un bout de réflexion
Au Cap Vert, j’ai été pendant trois semaines d’affiler 24/24h avec ma famille. Ca m’a pas mal ennuyé, d’ailleurs : je rêvais de rencontrer du monde, de me faire des contacts avec les gens du coin. Je déteste l’idée que j’ai pu aller si loin, dans un endroit si extra, mais que je suis restée dans la bulle familiale, et que du coup j'en suis sortie frustrée. Et même d’une manière générale, je suis du genre à adorer tout ce qui est contacts humains. Donc quand on ne peut littéralement adresser la parole qu'à cinq personnes pendant trois semaines, c’est embêtant.
Mais l’avantage, c’est que ces cinq personnes, j’ai eu beaucoup de temps pour les observer, de haut en bas et en profondeur. Et il y avait du rattrapage à faire, vu que je viens de rentrer chez moi après une année en Irlande. Bien sûr, je leur parlais toutes les semaines, mais il y a des changements que je n’ai pas vraiment vu passer. Et puis ne plus les voir pendant un an m’a donné énormément de recul.
J'ai écrit un article énorme (3 pages Word, quand même!) donc je vais le couper en plusieurs parties, pour faire passer.
Je me suis rendu compte de plusieurs choses. Déjà, d’une manière générale, j’ai pu réaliser pour la première fois qu’est-ce qui fait exactement de chez moi un endroit spécial. J’ai vu et analysé quelles étaient les principales différences, en particulier dans la façon dont laquelle ma mère « éduque » mon frère : quand on pense que pour moi, ça a été à peu près la même chose que ça l’est pour lui maintenant, ça apprend beaucoup de choses.
C’est une éducation légèrement obsédée par la justice : ne jamais donner plus à l’un qu’à l’autre, toujours se débrouiller pour que personne ne puisse se plaindre qu’on a favorisé l’autre dans le règlement d’une dispute entre frères et sœurs. C’est une éducation non violente, aussi, et dans lequel les rapports d’autorité sont évités au maximum : mes parents se débrouillent toujours pour qu’on leur obéisse sans que ça soit pris comme une victoire de leur part. C’est une éducation « bulle », encore. Ce mot va très bien à ma famille : des asociaux (oserais-je dire marginaux ?) qui ne nous ont jamais poussé à faire mieux dans le domaine. Ne regardent pas la télé, ne nous ont jamais mis que des Walt Disney : mon frère ne sait pas ce qu’est un feuilleton télévisé, il n’a jamais entendu parlé de Zidane. Mais aussi, pour développer mon idée de « bulle », ma mère censure tous les propos jugés trop « durs » pour les enfants. Je me souviens que quand on était chez mes grands-parents, je devais avoir 8ans, elle m'a ordonné de fermer les yeux quand des images de guerre passaient à la télé. C’est aussi, il faut le dire, une éducation dramatiquement intello.
Pour commencez, parlons de mes parents. Vous savez, à 16ans, même quand on a des parents qui s'entendent bien, on a du mal à imaginer qu'un jour, on va rencontrer quelqu'un et qu'on pourra passer 30 ans avec lui sans mourir d'ennui, qu'on pourra rester ensemble non pas "pour les mômes", "par peur d'être seul" ou "par manque de courage", mais parce qu'on s'aime, vraiment, et que le temps n'y change rien. J'ai du mal à m'imaginer moi-même dans cette situation, et du coup j'ai du mal à y croire pour mes parents. Je me demande des fois si leur bonne entente n'est pas superficielle.
Pourtant, il faut se rendre à l'évidence : mes parents s'aiment, mes parents s'entendent super biens, mes parents ont bâtit une relation hyper stable. Sans illusions enfantines, c'est impossible qu'il en soit autrement.
On le voit tous les jours : ils s'embrassent tout le temps (pour certains ça peut paraître bizarre, mais bon depuis le temps moi j'y suis habituée...), ils partent deux week-ends par an ensemble, sous l'initiative de mon père qui fait destination surprise à ma mère, ils passent des heures à discuter tous les week-ends et en vacances. Ils ne s'engueulent jamais que pour des broutilles, et puis le ton ne monte jamais bien haut et ça ne dure jamais longtemps. Ils se reprochent des choses, bien sûr, et ils ne le cachent pas : d'un certain côté, cela montre qu'ils l'ont accepté. Ils se sont acceptés mutuellement, et ils rigolent beaucoup tous les deux. En particulier cet été, j'ai trouvé qu'ils faisaient très couple fraîchement formé qui se fait des yeux de merlan fris. Je suppose qu'ils ont du avoir des hauts et des bas, comme tous les couples. Ils ont juste dû éviter de nous mettre au courant des "bas". Pour moi, en tout cas, c'est une bonne base de savoir que "c'est possible". Il est possible de se rencontrer à 25 ans, d'évoluer ensemble et de toujours s'aimer à 50.
C'est marrant, récemment mon père s'est fait une amie de 30/35 ans dans un club de méditation (ai-je oublié de dire que mon père est un allumé complètement accroc à tout ce qui est spirituel?). Depuis le début il nous parle d'elle, et on l'a rencontré plusieurs fois, pour faire connaissance. Je sais que ma mère est assez paisible par rapport à ça, mais quand même, un homme de 50 ans qui côtoie une jolie nana assez "esprit libre" beaucoup plus jeune que lui, c'est louche. Je ne sais pas si je suis la seule à avoir des idées comme ça (j'en ai assez honte d'ailleurs...), mais moi en tout cas, je ne peux pas m'empêcher d'y penser. Et effectivement, après réflexion et observations, je pense qu'entre mon père et elle, c'est simplement une relation d'amitié. Ca intéresse mon père que quelqu'un si loin de lui se confie à lui : c'est clair qu'elle doit avoir une vision des choses différentes des siennes!! Je n'ai pas de conclusions à cette histoire, j'observe. Je sais que ma mère ne fait pas de crises de jalousie, et qu'elle fait des efforts à ce sujet : un jour ils étaient tous les deux (mon père et la fille) dans le jardin, et je sentais qu'elle n'osait pas trop y aller de peur de faire "femme jalouse chieuse".
Ma relation à moi avec mes parents?? Elle est plutôt bonne. Mais quand j'entends mes copines dire "à ma mère, je peux tout dire!" ou "sans ma mère, je suis fichue" ou autres, je me dis que finalement je suis peut-être quelqu'un de plutôt éloignée de mes parents. Le principal, c'est qu'on s'entend bien, je les aime bien, ils m'aiment beaucoup aussi. Ils sont intéressés dans ce que je fais, et ils me soutiennent.
Et ça, c'est super important : depuis le début, ils m'ont toujours aidé tout en me laissant autant d'autonomie que je le voulais. On a su établir une relation de confiance, et maintenant c'est vrai que je n'accepte plus aucune directive de la part de mes parent : il m'a été aussi surprenant qu'à eux de constater que j'avais laissé en Irlande la relation parent-enfant où les parents disent aux enfants ce qu'ils ont à faire. Je ne le supporte plus, et leurs ordres me paraissent décalés, comme si la boulangère m'ordonnait de ne pas porter des couleurs qui pètent. Je n'ai jamais dis "non" ou râlé ou quoi que ce soit, mais dès qu'ils me font une remarque un peu à la directive, ça tombe à plat. Alors petit à petit, ils arrêtent.
Je ne m'engueule jamais avec mes parents (de toute façon, vous remarquerez que c'est rare que je m'engueule avec qui que ce soit). Et c'est en partie parce qu'eux ne m'engueulent pas souvent : j'ai l'impression que je ne le supporterais pas, là non plus. Je me souviens en 5eme, ils m'avaient fait la morale parce que j'avais eu une mauvaise note en maths. J'en rie maintenant, mais je me souviens l'avoir très mal pris à l'époque : les cours, c'était mon problème. A partir du moment où ma mère ne m'aidait pas pour mes devoirs et ne vérifiait rien d'une manière générale, pourquoi râlait-elle pour une mauvaise note?? J'ai toujours trouvé ça super con d'engueuler les gens pour des mauvaises notes de toutes façon : j'avais pas fait exprès. Eux faisaient une interprétation psychologique comme quoi si je n'étais pas bonne en maths, c'est parce que je faisais un blocage, qu'en vérité je n'essayais pas à fond. C'était sans doute vrai, vu que cette année j'ai eu des résultats vraiment bons dans un niveau bien plus difficile (c'était comme un challenge pour moi, donc je m'y suis mise...). Mais ça ne servait à rien de le dire comme ça.
Si vous voulez tout savoir, je crois que j'ai toujours un peu eu envie qu'on s'occupe de moi, qu'on fasse attention à moi. Ma mère me le dire encore maintenant : je ne suis jamais vraiment malade, mais j'ai toujours mal quelque part. Mes parents m'ont toujours porté de l'attention, mais comme j'ai deux soeurs de la même tranche d'âge, ils ont souvent pris comme évident des choses pour lequel on aimerait avoir plus de mérite, et il leur arrive vite de faire des généralités sur notre cas à toutes les trois. Mais là, je déborde sur mon prochain sujet d'article : ma relations avec mes soeurs.
Commentaires :
Re:
Ca me fait plaisir vraiment, parce que je me sentais un peu coupable en publiant cet article : "merde, je raconte encore ma vie pendant 3h..."
Tranquille, c'est le mot ;)
C'est vrai que les relations avec tes parents sont totalement différentes de celles que j'ai avec les miens.
Eh oui, il faut se rendre à l'évidence, un blog, c'est fait pour raconter sa vie :)
Re:
ouais! justement je pensais à toi quand je disais ça!
On a des relations différentes avec nos parents, mais ce qui est bien, c'est que ça nous convient à toute les deux... Bien sûr il y a des plus et des moins partout, mais c'est normal.
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Miss-Jade
Une famille tranquille quoi :)