un bout de réflexion
Des fois, je reproche intérieurement à mes potes de ne pas assez essayer de se mettre à la place des profs/pions/principaux et de s'énerver très vite d'une sanction/mesure/décision qui n'aurait parfois pas pu être autre.
Aujourd'hui, je sais que je devrais pouvoir comprendre et ne pas dire bêtement "c'est dégueulasse, c'est injuste", pourtant j'avoue que j'ai du mal.
Rien de dramatique, pourtant. Une fille de ma classe, celle qui nous faisait des crises d'asthme tout le temps à une période. Elle sort avec un gars du collège depuis 5 mois. Comme ils s'embrassent un peu tout le temps dans la cour, la principale leur a un jour fait une réflexion pour qu'ils arrêtent, "ça n'est pas un endroit pour faire ça". L'argument, bien qu'un peu léger, s'entend. Même si la cour de récréation est sensé être un lieu de "liberté", en sachant que la liberté s'arrête là où commence celle des autres, son rôle impose sans doute à la principale d'agir contre le laissé aller et tous ce qui n'est pas conventionnel.
Aujourd'hui, elle est appelée dans son bureau. A ce qu'elle m'a raconté, elle a été prise au dépourvu : la principale, le CPE et la psychologue scolaire ont été réunis pour lui faire la morale, pendant plus de 20 minutes, pour "récidive". Le problème, c'est qu'elle a été vue entrain de faire un "câlin" à un autre garçon (pour être dans le contexte, il faut comprendre que ce groupe d'amis est du genre à se faire des câlins tout le temps, que ce soit entre filles entres mecs ou mixte). On lui a dit qu'elle allait finir dans des tournantes, que "toutes les filles en chaleur qui sont passées avant toi ont finis par être renvoyées", et qu'elle allait "finir sur le trottoir". A ça, je suppose, s'est ajouté l'éternel sermon, mérité peut-être. Et elle a convoqué ses parents.
Cette fille qui va déjà très très mal, qui trouve son seul réconfort avec ce mec gentil comme tout, qui redouble et dont les parents ont dit que "il faut vraiment être demeuré pour ne pas réussir en 3e". Elle était effondrée. Déjà, la mettre dans cette situation où tout le monde est rassemblé pour l'engueuler, sans qu'elle puisse répondre quoi que ce soit. Surtout qu'elle n'a aucun tord, à part celui d'avoir un peu continué à désobéir à une règle qui n'est pas officielle, de toute façon... Il y a des dizaines de couples qui s'embrassent dans la cour, qui essayent de s'exhiber le plus possible, et il y a tellement pire... Des élèves qui passent des bras de l'un à l'autre sans soucis, en couchant avec tout le monde si possible, qui fument, et qui se vantent du tout... Eux, ils sont un couple "stable", un couple qui marche dans une espèce d'indifférence envers beaucoup de choses, qui n'essaye pas d'être un couple "passionné".
Et ses parents ne vont pas lui faire de cadeaux, parce qu'ils ne veulent déjà pas qu'elle voie des garçons... Elle sait très bien qu'elle n'aura plus le droit de voir ses amis le week end à partir de l'année prochaine, où elle va dans un autre collège, qu'elle va se faire engueuler pendant des heures, qu'elle ne pourra plus revoir son copain dès la semaine prochaine.
J'ai voulu réagir, faire quelque chose. En tant que déléguée qui a une grande cotte auprès de la principale... J'avais des arguments : elle n'avait pas bien interprété le "câlin", elle avait prise la fille par surprise pour la fragiliser avec des termes beaucoup trop durs, la fille n'allait plus pouvoir revoir ces amis et ses parents allaient faire un scandale, il fallait ouvrir le dialogue. Dire qu'elle arrêtait, qu'elle pouvait être indulgente pour la fin de l'année, qu'elle avait déjà beaucoup trop de problèmes et allait déjà assez mal pour qu'on la mette dans une telle situation à cause de cette relation, pourtant stable et positive. Lui expliquer que si on se met à sa place, il n'y a pas d'autres solutions que la rébellion ou l'écrasement total, qui ne lui ressemble pas.
Mais juste après sa convocation, la principale est partie pour un conseil de classe. Et elle a convoqué les parents le lundi à 8h. En gros... La seule chose que j'ai pu faire pour Adèle, c'est lui conseiller de tout dire à ses parents, de pleurer comme elle l'a fait avec nous, d'essayer de leur imposer de réfléchir, de la considérer. Et peut-être qu'on essayera d'aller voir la principale quelques minutes avant le rendez-vous...
J'aimerais pouvoir faire quelque chose, j'ai le statut légal pour, mais je ne peux pas. Je me sens à la fois impuissante et trop exigente de vouloir pouvoir être utile.
Commentaires :
Injustice et impuissance
Si injustice il y a, c'est souvent caractérisé par le fait que l'on n'a pas la possibilité concrète d'agir pour lutter contre elle.
Et de plus, Même si La principale t'écoutera peut être , les parents je sais pas, ce qui est bien triste, sauf si La principale décide d'adoucir ses paroles et minimiser le fait.Mais il me semble qu'elle a des moeurs et des idées bien arrêtées sur la question...
Re: Injustice et impuissance
Mais en fait, ça c'est passé differement : ses parents ont plutôt "bien" réagi : ils sont super en colère contre la principale pour avoir dit tout ça, alors ils veulent la voie AVEC les parents de Jérome (qui n'avait jusque là pas d'emmerdes lol) et ils veulent en faire tout un touintouin. Ils interdissent aussi formellement à Adele de le revoir, mais vu qu'ils ne sont jamais chez eux, ils pourront pas fliquer...
L'exclusion
Le problème dans ton cas précis étant de trouver un moyen de faire comprendre à ces adultes qu'ils sont en train de générer une exclusion et donc un sentiment d'injustice chez cette fille.
Une lettre commune de toute la classe au directeur peut-être?
Ce qui est en tout cas ridicule, si ce que tu dis reflète la réalité, ce sont les proportions que les adultes accordent à ce problème.
Re: L'exclusion
Ridicule, effectivement. On a d'ailleurs eu du mal à croire que c'était sérieux. En fait, j'ai l'impression que pour plusieurs raisons, mais dont aucune n'est vraiment valable, ils se sont tout à coup sentis très inquiêts qu'elle puisse réellement finir dans une tournante... (ils y tiennent, à cette expression).
Si j'avais parlé à la principale, j'aurais essayé de lui demander de se mettre à la place d'Adèle, ou du moins de lui faire comprendre le point de vue d'élève...
Mais cette histoire est passée comme tous les autres problèmes élèves/administration, sauf que cette fois, ça parraît injuste. Beaucoup de sanctions nous semblent disproportionnées, injustifiées même parfois : mais si on se met à la place du principal, on trouve toujours une logique qui se tient. Là, pas tellement.
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Bref.......